Harriet Monroe, ed. (1860–1936). The New Poetry: An Anthology. 1917.
La Neige à PoughkeepsieLysiane Bernhardt
L
Chaque toit d’un glaçon pointu,
Couvert chaque route de neige,
Poughkeepsie avait hier, comme par sortilège,
Transformé sa grisaille en de fraiches clartés.
La neige est couleur de gaîté!
Le ciel est gris, la terre est blanche,
Sous l’avalanche.
N’est point bati pour s’exiler.
L’ennui s’y trouve en étalage—
C’est plus froid qu’une ville et moins beau qu’un village;
Mais sous les fleurs d’hiver Poughkeepsie a souri—
La neige avait partout fleuri!
Le ciel est gris, la terre est blanche,
Sous l’avalanche.
Poughkeepsie en costume hivernal
Prend la grace d’une bourgeoise
En sa robe de mariée! Elle apprivoise
Le voyageur qui passe, et sur ses froids chemins
La neige a tracé des jardins!
Le ciel est gris, la terre est blanche,
Sous l’avalanche.
Et chaque plaine sans confins
Est une steppe en robe claire.
“On n’entend plus marcher les vivants sur la terre,”
Souffle un mort à son frère; “il doit neiger là-haut!”
La neige a donné son assaut!
Le ciel est gris, la terre est blanche,
Sous l’avalanche.
Mais quand la neige resplendit,
Et, changeant les pierres en marbre,
D’une maison fait un palais, et quand chaque arbre
Porte une floraison, riez, gosses et gens,
La neige est un autre printemps!
Le ciel est gris, la terre est blanche,
Sous l’avalanche.