St. John Lucas, comp. (1879–1934). The Oxford Book of French Verse. 1920.
Jean-Baptiste Rousseau 16711741
179. Ode
Songer encore à vos malheurs,
Quand, pour apaiser vos douleurs,
Tout cherche à vous marquer son zèle?
L’univers, à votre retour,
Semble renaître pour vous plaire;
Les Dryades à votre amour
Prêtent leur ombre solitaire.
Loin de vous l’aquilon fougueux
Souffle sa piquante froidure;
La terre reprend sa verdure;
Le ciel brille des plus beaux feux:
Pour vous l’amante de Céphale
Enrichit Flore de ses pleurs;
Le zéphyr cueille sur les fleurs
Les parfums que la terre exhale.
Les oiseaux cessent leur ramage;
Et le chasseur le plus sauvage
Respecte vos jours innocents.
Cependant votre âme, attendrie
Par un douloureux souvenir,
Des malheurs d’une sœur chérie
Semble toujours s’entretenir.
Hélas! que mes tristes pensées
M’offrent des maux bien plus cuisants!
Vous pleurez des peines passées;
Je pleure des ennuis présents;
Cherche à calmer vos déplaisirs,
Il faut même que je me prive
De la douceur de mes soupirs.