St. John Lucas, comp. (1879–1934). The Oxford Book of French Verse. 1920.
Victor-Marie Hugo 18021885
244. Le Chasseur Noir
—Q
Les corbeaux volent en grand nombre.
Il va pleuvoir.
—Je suis celui qui va dans l’ombre,
Le chasseur noir!
Sifflent… on dirait
Qu’un sabbat nocturne emplit de huées
Toute la forêt;
Dans une clairière au sein des nuées,
La lune apparaît.
Cours dans les bois, cours dans la friche,
Voici le soir.
Chasse le czar, chasse l’Autriche,
Ô chasseur noir!
Chasse les cerfs qui viennent paître
Près du manoir.
Chasse le roi, chasse le prêtre,
Ô chasseur noir!
Il tonne, il pleut, c’est le déluge.
Le renard fuit, pas de refuge
Et pas d’espoir!
Chasse l’espion, chasse le juge,
Ô chasseur noir!
Tous les démons de Saint-Antoine
Bondissent dans la folle avoine
Sans t’émouvoir;
Chasse l’abbé, chasse le moine,
O chasseur noir!
Chasse les ours! ta meute jappe,
Que pas un sanglier n’échappe.
Fais ton devoir!
Chasse César, chasse le pape,
Ô chasseur noir!
Le loup de ton sentier s’écarte.
Que ta meute à sa suite parte!
Cours! fais-le choir!
Chasse le brigand Bonaparte,
Ô chasseur noir!
Que le sabbat sombre aux rauques huées A fui la forêt; Le clair chant du coq perce les nuées; Ciel! l’aube apparaît! Tu redeviens la France altière Si belle à voir, L’ange blanc vêtu de lumière, Ô chasseur noir! Tombent… on dirait Que le sabbat sombre aux rauques huées A fui la forêt; Le clair chant du coq perce les nuées; Ciel! l’aube apparaît!